Emily Martin, p. 147 -- la page centrale du chapitre 5, au niveau conceptuel -- à propos des groupes de soutien à la maladie mentale :
Les termes [de la nomenclature psychiatrique : le DSM], que j'ai décrits plus tôt comme des manteaux sous lesquels on peut s'abriter, pourraient être mieux compris, peut-être, as soft fabric, antimacassars, whose function in the interior space of the support group is to capture the evidence that a person was in the group and to soak up the traces of her social existence.De quoi s'agit-il ? A cet endroit, une note de bas de page vient clarifier l'affaire (note 11, p. 313-314) :
Dans Paris capitale du XIXè siècle, un ensemble de matériaux que Walter Benjamin réunissait pour expliquer le lien entre l'essor du commerce moderne et la culture dans le Paris du XIXè et du début du XXe siècle, "l'intérieur" est un thème important. (...) Benjamin se réfère aux "traces" que les gens laissent dans ces espaces, traces qui restent à la surface des tissus d'ameublement. Envisagés sous cet angle, les nombreux coverings for furniture - antimacassars - , caractéristiques de cette époque, peuvent être vus comme des matériaux dont la fonction est de garder des empreintes autant que de protéger.Suit une citation de Benjamin :
"L'intérieur est non seulement l'univers du particulier, mais aussi son étui. Habiter signifie laisser des traces. Dans l'intérieur l'accent est mis sur elles. On invente une foule de housses et de taies, de gaines et d'étuis où s'impriment les traces des plus quotidiens des objets d'usage. Les traces de l'habitant elles aussi s'impriment dans l'intérieur." (Paris capitale du XIXè siècle : lieux de passage, traduction Jean Lacoste, p. 41-42)
[La métaphore un peu baroque des tissus -- non, un peu romantique (s'il s'agit du Paris du XIXè) ? La métaphore empire -- comme les fauteuils -- court dans tout le chapitre :
* p. 143 : "Ainsi, par des petites choses, [dans les groupes de soutien] a fabric of relatedness is created for people over time." Ma première idée était de traduire par "les gens se rapprochent et tissent des liens au court du temps" mais la métaphore est peut-être un peu affaiblie ?
* juste avant la citation ci-dessus, à la page 147 aussi : "La présence continue du groupe de soutien, malgré la participation incertaine et fluctuante de ses membres, peut fonctionner as a softly furnished haven." Un "havre", donc, mais "soflty furnished" ? Pas un havre doux et bien meublé ; "soft furnishment", ce sont les tissus pour recouvrir les meubles.
Antimacassars, alors ? Je rajoute à la fin de la note 11 - après la citation de Benjamin, "On invente une foule de housses et de taies...", un commentaire :
["taies" traduit ici l'allemand Schoner, antimacassar en anglais [NB : je ne parle pas un mot d'allemand, mais j'ai retrouvé le passage dans le texte original, via google livres, parce que Schoner c'est vraiment la traduction de "antimacassar", ce qui montre que le terme est un équivalent plus exact que le terme de la traduction française] : un tissu posé sur les accoudoirs ou le dossier d'un fauteuil, là où repose la tête ou les bras. Dans le texte, quand l'auteure reprend ce mot pour décrire le rôle des termes du DSM, nous avons traduit par "têtière", qui a eu cette signification précise, même si les transformations sociologiques dans le design des fauteuils, ainsi que la multiplication d'autres significations techniques pour "têtière", en ont obscurci le sens en français.]Mais la maison d'édition sera-t-elle d'accord ?
Etrangement, les termes pour décrire les intérieurs parisiens fonctionnent bien en anglais et en allemand, semble-t-il, mais pas en français. Google image le montre clairement.
Cela valait bien une petite "note du traducteur". (NdT)]
(Image : Saisie d'écran sur google image pour "têtière", en bast, et "antimacassar", en haut.)
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